Sarkis (Sarkis Zabunyan, dit)

Sarkis, "Mains, d’après Matthias Grünewald", 1992 - aquarelle sur papier - Collection Géotec, achat 2014

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Titre de l’œuvre : Mains, d’après Matthias Grünewald

Date de l’œuvre : 1992

Technique : aquarelle sur papier

Dimensions : 102 x 64 cm

Collection Géotec, achat 2014

Localisation actuelle : Entrepôt 9 (Quetigny)

D’origine arménienne (il est né en 1938 à Istanbul), Sarkis s’installe à Paris en 1964 et commence une activité de peintre. Depuis les années 70, ses œuvres, hantées par la réparation et la transmission, se présentent le plus souvent sous forme d’installations. Elles sont riches en références à l’histoire, la philosophie, les religions, les arts ou la géopolitique, dans une approche volontairement cosmopolite de la culture mondiale, associant souvent des objets éloignés dans l’espace comme dans le temps, puisés dans ce que Sarkis appelle son « trésor de souffrance ». À partir de son expérience personnelle et du grand chaos de l’histoire humaine, envisagée dans un rapport « achronologique », il entend libérer les énergies provenant de la mémoire tant collective qu’individuelle et emmagasinées dans les objets qu’il convoque.

Deux œuvres picturales majeures de l’histoire de l’art ont profondément marqué Sarkis : Le Cri d’Edvard Munch (1893), où un personnage à la bouche hurlante se détache sur un paysage violemment coloré, et Le retable de la Crucifixion d’Issenheim (1512-1516) de Mathias Grünewald (v.1475-1480 – 1528), dont le panneau central présente la vision réaliste et douloureuse du corps supplicié du Christ. Très différentes par leur sujet et leur style, ces œuvres ont en commun la représentation d’un même sentiment, celui de la souffrance de l’existence humaine.

Le retable de Grünewald est une commande de la Commanderie d’Issenheim, près de Colmar, laquelle dépendait de l’ordre hospitalier des Antonins. La vocation de cet ordre était de soigner les malades atteints du « mal des ardents » ou « feu de saint Antoine », une maladie transmise par un champignon présent dans l’ergot de seigle. Selon les croyances de l’époque, le retable devait participer au rétablissement des malades en leur inspirant courage et consolation face à l’agonie du Christ, tandis que la scène de la Résurrection était source d’espoir d’une guérison. Il est à l’origine d’un ensemble d’aquarelles réalisées par Sarkis, précisément le motif des mains de Marie ou de Marie-Madeleine présentes au pied de la croix du Christ, mains jointes en un geste expressif de désespoir, de désolation et d’imploration. C’est l’universalité de la charge émotionnelle de ce geste que Sarkis s’attache à souligner, dans la continuité de ses autres travaux consacrés à la gestuelle et au toucher.

Cette aquarelle reprend, agrandi, le détail des mains entrelacées de Marie, isolées sur un fond blanc qui les découpe et colorées l’une en verte, l’autre en rouge. Sarkis utilise souvent ces deux couleurs complémentaires et opposées depuis son exposition personnelle CRISE (en rouge et vert), en 1979 à la galerie parisienne Sonnabend, sans toutefois y attacher une signification symbolique, le rouge « réchauffant » simplement le vert. Sarkis est convaincu que la fonction de l’art est d’ordre sacré et thérapeutique, aussi la contemplation de cette œuvre, comme celle du retable d’Issenheim, peut-elle donc être source d’apaisement, en vertu des forces conjuguées de l’art et de l’esprit.

 

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